DEUX RÉCITS DE COMBATS AU GRAND ROZOY

LE GRAND ROZOY, FIN MAI 1918

Monsieur Léon Bigaret, mobilisé en 1916, raconte l'anecdote suivante sur une phase de Combat qui se déroulait à environ deux cents mètres au sud de l'église de GRAND ROZOY fin mai 1918

Mon unité, le 120ème R.I., se trouvait dans l'Aisne en Mai 1918. Ma compagnie était en position sur la lisière sud de GRAND ROZOY et effectuait une opération de reconnaissance en lignes ennemies.

Une "saucisse" d'observation allemande surveillait et se trouvait sur une légère hauteur entre GRAND ROZOY et BEUGNEUX.

Les Allemands, comme nous, faisaient de nombreuses patrouilles de reconnaissance.

L'artillerie allemande appuyait ses mouvements et avait pour objectif principal l'église de GRAND ROZOY qui fit l'objet de tirs de harcèlement fréquents. Malgré les coups au but, je me souviens que l'horloge sonnait toujours ponctuellement les heures.

La petite unité à laquelle j'appartenais manoeuvrait en patrouille et s'est trouvée contournée par une autre patrouille allemande.

C'est à ce moment que sept d'entre nous (dont moi-même) fûmes faits prisonniers à quelque deux cents mètres au sud de l'église.

Les Allemands, une seconde fois avaient fait une percée au Chemin des Dames et la Grosse Bertha tirait sur Paris.

Château Thierry était investi.

Des renforts français arrivaient par la suite et bien qu'emmenés en Allemagne; notre captivité fut abrégée puisque l'Armistice signé le 11.11.1918 consacrait la victoire de la France et de ses Alliés.

Je fus rapatrié par la Hollande (Rotterdam - Le Havre).

LE 16ème RI, LE 29 JUILLET 1918, AU GRAND ROZOY

Récit du Combat de GRAND ROZOY - 29 juillet 1918

Le Colonel Fernand Jaupart, Lieutenant à l'époque raconte le combat du 16ème RI dans la reprise du GRAND ROZOY.

Je tiens à préciser que la participation unique du 16ème R.I. à l'attaque et à la prise du GRAND ROZOY, est authentifiée par la lettre du Général Commandant la 10ème Armée (Général MANGIN), confirmée par l'attestation du Lieutenant Colonel COLOMBAT, qui figure sur le même document

Le Grand Rozoy le 5 A

Situation générale

Celle-ci résultait de la grande offensive qui, menée par les Allemands au début de juillet, les avait menés du Chemin des Dames (région de Soissons, au Nord), jusqu'en bordure de l'Ourcq, au Sud.

Le commandement français avait décidé de résorber cette poche, et, entamant l'offensive, avait refoulé l'adversaire vers le Nord, jusqu'en bordure du Plessier-Huleu, Grand Rozoy, etc.

Ce même commandement avait décidé également de poursuivre cette offensive avec des moyens accrus, et réalisant avec le plus grand secret leur mise en place, tant dans leur acheminement ou leur stationnement; pour cela, il fut utilisé au maximum tous les masques que représentaient les nombreux boqueteaux existant dans la région.

Emploi massif de l'artillerie et de l'aviation

(surtout mise en action de moyens absolument nouveaux, représentés par les petits chars "Renault")

Ces chars étaient fabriqués en secret et furent acheminés sur le front, de nuit.

Ils étaient constitués en unités de 5 engins, comprenant 3 chars "mitrailleuses" et 2 chars munis de canons de "37".

Comme on le verra par la suite, leur emploi se fit dans une pleine réussite.

Exécution de l'attaque de GRAND ROZOY

Celle-ci fut réalisée par le 16ème R.I., qui, résidant en temps de paix à Montbrizon (Loire) faisait partie de la 25ème D.I. Composé de trois bataillons d'infanterie, il avait jusque là combattu vaillamment dans la Somme à l'attaque de St. Quentin, à Verdun ...

Son recrutement se composait de beaucoup de soldats originaires du centre de la France, au moral solide.

La mise en pratique de nouveaux procédés de combat, et la masse de moyens de tous ordres, mis en action, avaient en quelque sorte rendu le moral à ces combattants.

Journée du 29 juillet 1918

Venant de l'Argonne, nous étions arrivés la veille dans la région, et nous étions installés dans les bois; nous étions au courant de la présence à nos cotés d'engins blindés, eux aussi très bien dissimulés.

L'attaque projetée devait être déclenchée le lendemain, au petit jour, avec la conquête, comme objectif essentiel, du village de GRAND ROZOY.

Nous n'étions pas au courant des troupes qui étaient engagées à nos côtés, sauf les bataillons du régiment.

Les blindés, eux, avaient des objectifs lointains.

Je marchais en tête de ma compagnie. Au début, la progression se fit facilement, sans réaction de la part de l'ennemi simplement, je fus avisé que des Allemands avaient été découverts, dissimulés dans des bottes de foin.

Atteignant le village, je constatais un spectacle qui me remplit d'étonnement et d'émotion :

- sur la côte 152, dominant la localité, 2 mitrailleuses lourdes allemandes se trouvaient en batterie, mais sans que des servants soient présents.

Plusieurs hypothèses justifiaient la non-présence des servants :

- ou bien ils avaient abandonné leur poste

-ou bien, blessés, ils avaient dû être enlevés par ambulance.

Mais il est certain que s'ils eussent été à leur poste, peu d'entre nous auraient pu échapper aux tirs.

A ce moment se place l'incident de la CONTRE ATTAQUE ALLEMANDE.

Observant à la jumelle la région au sud du village, j'apercevais des groupes d'hommes, qui, manoeuvrant comme à l'exercice, se repliaient par bonds.

Je constatais alors qu'il s'agissait de troupes anglaises qui, tenant le FRONT à côté de notre 3ème bataillon, se retiraient devant une contre-attaque allemande.

Ce mouvement de recul s'effectuait, certes, en ordre parfait, mais il eut pour conséquence de livrer notre 3ème bataillon à l'ennemie en abandonnant de nombreux prisonniers.

Je poursuivis la marche de ma compagnie, vers le centre du village, situé en contrebas; là, nous fûmes l'objet d'un violent tir d'artillerie de l'adversaire qui occasionna de lourdes pertes; moi-même, je fus atteint d'un gros éclat d'obus.

Avec un très grand regret, je dus abandonner le combat et être évacué vers l'arrière par ambulance.

Là s'arrête le récit de ce combat, et je ne pourrais donner d'autres renseignements que ceux qui me furent communiqués par la suite. J'ai appris, notamment que les pertes subies par mon régiment quoique sévères, n'ont pu empêcher le poursuite du régiment en avant, ainsi qu'il est dit dans l'ordre général (ci-joint) du Général MANGIN, commandant la 10ème Armée.

C'est avec émotion que j'ai retracé ma participation à la libération du Village de GRAND ROZOY, et je salue avec peine la mémoire de ceux qui sont tombés dans ce combat.

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