Les Américains sur la vallée du Clignon

2ème Division US

Elle sera constituée en France, elle regroupe deux brigades d'infanterie à 2 régiments : la 3ème Brigade, composée des 9ème, 23ème, régiments d'infanterie, plus un bataillon de mitrailleuses, le 5ème, la 4ème Brigade sera également assemblée en France, mais sera composée de Marines, qui normalement sont des fusiliers Marins destinés à servir sur les vaisseaux de l'US Navy comme force de débarquement, ils seront expressément autorisés à servir en France avec l'armée US, par le président Wilson, le 25 mai 1917.

Cette brigade Marine, sera constituée en premier lieu du 5ème Régiment USMC (U.S. Marines Corps), qui arrivera en Juin 1917 en France, puis du 6ème régiment USMC qui arrivera début 1918, et du 6ème régiment de Mitrailleurs USMC qui sera lui assemblé en France début 1918, viendront en complément de cette deuxième division, une brigade d'artillerie, 2 régiments de 75, les 12ème et 15ème, un de 155 le 17ème,et le 2ème régiment d'artillerie de tranchée, le 2ème régiment du génie, et bien sûr toutes les unités logistiques et de soutien d'une division, aussi divers soient-ils : train de munitions, train sanitaire et hôpitaux de campagne, transmissions, cuisiniers, boulangers, police militaire, service postal, etc, soit au total à peu prés 25000 hommes.

Les premières unités, qui arrivent en France en Juin 1917 à Saint Nazaire seront les Marines du 5ème régiment USMC, puis ils seront envoyés en septembre dans la région de Bourmont (Haute Marne) et Menaucourt dans la Meuse, pour être entraînés à la guerre de tranchée avec les français, notamment des Chasseurs, ils sont déjà considérés comme troupe d'élite, pratiquement toutes les unités de la 2ème Division au fur et à mesure de leur arrivée en France se retrouveront dans cette région pour y recevoir leur entraînement, sauf la brigade d'artillerie qui sera elle envoyée dans un camp au Valdahon, pour un entraînement spécifique.

Pour les combats au nord ouest de Château-Thierry, le Général commandant la 2nd Division sera le Major Général Omar Bundy, les 2 brigades d'Infanterie seront commandées respectivement pour la 3ème Major Général Edward M. Lewis, et la 4ème Brigade, composée de Marines, par le Brigadier Général James J. Harbord (qui est non pas un Marine mais un officier de l'US Army, se distinguant notamment par le port d'un casque français, avec ses étoiles de Général fixées sur l'avant !!!)

C'est la photo du fameux général James Harbord, coiffé de son casque français. C'est lui qui commandait la Brigade de Marines lors des combats de Bois Belleau, il n'était pas un général de l'USMC mais de l'Army et fût vite adopté par les Marines, d'ailleurs un officier de Marine lui offrait l'insigne des Marines qu'il est fier d'arborer sur le col de sa veste, sur cette photo prise à son poste de commandement en juin 1918, il est en plein interrogatoire de prisonniers allemands fraîchement ramenés de la ligne de front. Sur la gauche de cette photo est le Col. Mac Closkey, commandant le 12ème d'artillerie de campagne ( 75) de la 2ème Division.

De mars à mai 1918, toute la division à l'exception de l'artillerie, servira aux cotés des français sur un secteur au sud-est de Verdun, en seconde et première lignes, là ils découvriront la guerre de tranchées dans sa réalité subiront leur premières pertes souvent dues au bombardements, et gaz. Mais seront malgré tout dans un secteur calme, mis à part quelques raids de l'ennemi, mais aussi de leur fait, de l'autre coté des lignes.

Le 18 Mai la division est envoyée dans le secteur de Chaumont en Vexin, il est prévu pour elle de soutenir la 1ère Division US, qui se trouve sur la Somme près de Montdidier et Cantigny, mais suite à l'offensive allemande du 27 mai 1918, et la poussée allemande sur Château-Thierry et la Marne, elle est aussitôt mise à disposition de la 6ème Armée française du Général Degoutte, et envoyée dans la région de Château-Thierry, où les premières unités arrivent les 31 mai et 1er juin, à Montreuil aux Lions.

A ce moment les Allemands, sont bloqués sur la rive nord de la Marne et aussi à Château-Thierry, le pont ayant sauté, défendu âprement par les coloniaux et tirailleurs Sénégalais de la 10ème Division du Général Marchand, et une unité de mitrailleuses américaines de la 3ème division US, le 7ème bataillon de mitrailleurs. Le commandement allemand décide de pousser en direction du nord ouest de Château-Thierry, dont ils tiennent maintenant les hauteurs y installant leur artillerie.

Le 1er et 2 juin 1918, la situation du front au nord ouest de Château-Thierry est la suivante, la deuxième Division vient prendre position sur une ligne : Marigny en Orxois/ Bois de Veuilly et quelques unités du 23ème d'infanterie un peu plus sur la gauche prés de Coulombs en Valois, Ferme des Mares, nord de Champillon, nord de Lucy le Bocage, sud de Bouresches, Triangle et Bois de Clerembauts, le Thiolet, et de l'autre coté de la route nationale Paris Metz, sud de Bourbetin, et sud de Crogis. La 4ème Brigade Marine sur le secteur entre Bois de Veuilly et le Thiolet, et la 3ème Brigade 9ème et 23ème d'infanteries, viendront se disposer du Thiolet au sud de Crogis.

L'heure est grave, les Allemands ont pris tout le secteur au nord et la ville de Château-Thierry, alignant 4 divisions de Château-Thierry jusque Gandelu, respectivement depuis Château-Thierry, les 231ème, 10ème, 237ème, et 197ème plus 2 divisions en arrière garde, ils avancent maintenant vers le nord ouest en direction de la route Nationale, la côte 204 est prise, Vaux, bientôt Veuilly, Bussiares, Torcy, Belleau, le bois de Belleau et Bouresches, mais ils sont arrêtés devant Triangle par les éléments de la 73éme DI francaise, à Belleau et Torcy et au Bois de Belleau, le 152ème d'infanterie français ne lâche le terrain que pied à pied essuyant de lourdes pertes. Sur le secteur gauche des Marines et sur Bussiares se trouvent encore quelques éléments de la 164ème DI française, ainsi que le 152éme, et également on retrouve le 133ème d'Infanterie, et les 43ème, 59ème BCP, qui reculent ayant ordre de battre en retraite. On trouvera aussi curieusement le 12ème bataillon de Tirailleurs Malgaches qui appartient normalement à la Division Marocaine, (qui est sensée se trouver sur le secteur au sud ouest de Soissons) ce bataillon retraitant sur le secteur des Mares, Champillon. Toute cette retraite est très désordonnée devant la ruée ennemie, les soldats de la 2ème Division US sur qui maintenant une grosse part de l'histoire repose reçoivent ordre de s'enterrer et de tenir coûte que coûte.

La Brigade Marine :

Qui sont les Marines: Sur une décision du Congrès américain, le 10 novembre 1775, sont crées deux bataillons de Marines. En mars 1776, pendant la guerre d'Indépendance, ils participent à leur premier combat aux Bahamas, où à la suite d'une opération de débarquement, ils s'emparent de forts aux mains des Anglais. Depuis cette date, les Marines sont de tous les combats, aussi bien sur le territoire des deux Amériques, embarqués sur les navires ou sur terre, et aussi dans des pays lointains comme l'Orient ou l'Afrique. Du début du siècle à l'engagement des USA dans la Grande Guerre en 1917, ils combattront en Chine, à Panama, Vera Cruz, Haïti, San Domingue, au Nicaragua, au Mexique, à Cuba, aux Philippines.

Fort de toutes ces campagnes, il se forge parmi les Marines un esprit de corps hors du commun et une solide réputation de bravoure et de courage sans précédent, ces soldats sont des professionnels parmi les meilleurs que compte les Etats-unis. Pour être sélectionné pour la France, il leur faut subir des épreuves très dures et être qualifié " Marksman ", c'est-à-dire bon tireur, cela leur servira comme on le verra plus loin.

A noter aussi que tous les autres régiments de la 2ème division sont de vieux régiments ayant eux aussi participé à beaucoup de campagnes (Guerres Indiennes, Guerre Civile, Guerre hispano-américaine, etc. Donc une certaine expérience, mais pas dans la guerre de tranchées évidemment.

Le 2 juin 1918 les Marines du 2ème bataillon du 5ème régiment (composé de 4 compagnies d'environ 250 hommes chacune) se sont enterrés sur la ligne Bois de Veuilly (ouest de la Ferme), à travers champ, devant la ferme sur le plateau jusqu'à Champillon. Le poste de Commandement du Bataillon à Marigny. Ils subissent quelques pertes par les bombardements d'artillerie ennemie.

Le 4 juin 1918, les Allemands qui se sont emparés de Bussiares, Torcy, Belleau et Bouresches ainsi que du Bois de Belleau, vont tenter de "déboucher en direction de la route Nationale", leur divisions sont maintenant massées sur les plateaux au nord ouest de Château-Thierry, et la vallée du Clignon, la grosse percée doit se faire sur le plateau en direction de Marigny en Orxois.

Les Marines n'ont pas d'appui d'artillerie, car l'artillerie de la 2ème Division n'est pas encore arrivée en secteur, ils ont juste leur fusils, quelques fusils-mitrailleurs et mitrailleuses hochtkiss pour tenir la ligne de front, ce jour les quelques Français, dont des éléments de la 43ème DI, restant en avant, battent en retraite et traversent leur ligne, un Major français ordonnera à un Capitaine commandant une compagnie Marine à la ferme des Mares de battre en retraite et celui-ci de répondre "Retreat hell we just got here", battre en retraite nous venons juste d'arriver !! Cette phrase deviendra célèbre et sera reprise par beaucoup de politiques américains et d'autre officiers supérieurs. Cet officier Marine, le Capitaine Lloyd Williams sera blessé mortellement quelques jours plus tard lors des combats du Bois de Belleau.

Les Marines arrêteront l'attaque allemande, des 273ème régiment d'infanterie, et du 26ème bataillon de Chasseurs qui débouche des bois au sud de Bussiares, pas un Allemand n'atteindra la Ferme et Marigny, cela est le fruit de leur expérience de tireur d'élite, le coup d'arrêt est donné, à partir de ce jour les allemands n'avanceront plus en direction de Paris, la ferme des Mares est le point le plus proche de Paris atteint par les Allemands en juin 1918, c'est à dire à peu près 70 kilomètres.

Le 2ème bataillon Marines sera relevé par le 116ème régiment d'Infanterie français le 5 juin au soir.

Cette photo donne une idée de la violence des tirs d'artillerie sur le bois, plus de feuille, en juin, les arbres sont hachés, la progression dans le sous bois est très difficile

C'est un groupe de Marines avec leur trophées pris à l'ennemi, après la conquête de la partie sud du bois de Belleau le 11 juin 1918, on peut voir un gros mortier de tranchée allemand, ils tiennent dans leur main des grenades, etc. Le Marine complètement sur la droite de la photo coiffé d'un calot et en chemise, ce Marine s'appelait Edwin T. Beach et appartenait au 6ème bataillon de Mitrailleurs USMC.

Les attaques du 6 juin 1918 :

Le 6 juin 1918, les Marines reçoivent l'ordre de reprendre le bois de Belleau, le plan consiste en trois attaques différentes, la première sera lancée sur la côte 142 au sud de Bussiares et à l'est du bois Belleau cela dans le but de sécuriser le flanc gauche, la deuxième attaque sera lancée pour sécuriser le flanc droit par la prise de Bouresches, conjointement une attaque partira de l'est de Lucy le Bocage pour essayer de prendre la partie est jusqu'à Bouresches, et la dernière sera lancée depuis le bois au nord est de Lucy sur la lisière ouest du bois de Belleau, toutes ces attaques seront pour la plupart menées à travers des champ à découvert, sans appui d'artillerie, sur l'ennemi bien retranché et largement muni de mitrailleuses, ce jour du 6 juin 1918 sera le plus noir de l'histoire du Corps des Marines depuis sa création. Les pertes y seront plus élevées que dans toute l'histoire du Marine Corps depuis 1775 !

La situation au soir du 6 juin, la côte 142 est prise, une partie de la lisière sud du bois de Belleau, une ligne est établie dans le bois, et le village de Bouresches jusqu'à sa lisière nord. A noter aussi du côté de la 3ème Brigade d'Infanterie de la 2ème division, une attaque du 23ème régiment lancée aussi ce 6 juin pour avancer sur Vaux, mais elle sera stoppée elle aussi à quelques mètres de la route Bouresches- Vaux

La côte 142 :

Les Marines du 1er bataillon du 5ème régiment se sont enterrés, avec l'aide d'une unité du 2ème génie, (car ils n'étaient pas équipés d'outils et par conséquent obligés de creuser avec tout ce qu'ils pouvaient, casque, gamelle, baïonnette, etc) en lisière du bois au pied du point 142. Les Allemands avaient avancé sur les ravins et le bois situé devant eux à environ 200 mètres, et disposé de nombreuses mitrailleuses.

Les Marines ne sachant pas exactement combien il y avait d'Allemands en face et où ils se trouvaient précisément. L'attaque fut lancée vers 5 h 00 du matin au travers d'un champ de blé à découvert directement en face des mitrailleuses allemandes, les pertes furent terribles, de nombreux Marines furent tués dans les premières minutes, certains d'entre eux étaient des vétérans avec parfois 30 ans de service dans le Corps.

L'objectif étaient le nez de la colline au nord, après la première tentative, les Marines utilisèrent les deux ravins sur les flancs de la colline pour entourer leurs ennemis et atteindre l'objectif, les combats furent menés souvent à la baïonnette sans merci pour les mitrailleurs allemands. La colline fut prise au soir du 6 juin et malgré les efforts des Allemands pour la reprendre elle restera aux mains des Marines qui seront relevés à la mi-juin par un régiment français.

L'attaque sur le Bois de Belleau :

En même temps que l'attaque sur Bouresches, vers 17 h 00, cette attaque sur la lisière ouest du Bois fût lancée par le 3ème bataillon du 5ème Marines, identique aux autres attaques, à découvert, dans un champ de blé sur une distance d'environ 700 / 800 mètres, les Allemands attendant leurs assaillants bien retranchés sur la lisère du bois avec de nombreuses mitrailleuses, 3 compagnies s'élancent, une reste en support, les hommes se font littéralement hacher par l'artillerie allemande et les balles de mitrailleuses, seuls quelques uns atteindront la lisière du bois, les autres survivants reviendront la nuit tombée rampant dans ce qui reste du champ de blé, jusqu'à leur ligne de départ. Cette attaque fût un échec cuisant et coûteux en vie humaines.

Après le 6 juin, les Marines vont essayer d'avancer dans le bois en direction de la lisère nord, les Allemands sont retranchés dans les gros rochers et les ravins qui parsèment le bois, avec de très nombreuses mitrailleuses et tireurs d'élites judicieusement placés, etc. Il est très difficile de progresser dans de telles conditions, et dans un bois haché tous les jours un peu plus par la mitraille. Des attaques seront lancées les 7 et 8 juin, sans grand succès ni terrain conquis. L'artillerie de la 2ème Division arrive enfin et prend place les 8 et 9 juin. Le 10 juin un bombardement est effectué sur les lisères du bois et la partie nord, avant une attaque lancée conjointement par 2 bataillons Marines, l'un du 5ème régiment sur la lisère ouest du bois, et l'autre depuis Bouresches par le 1er bataillon du 6ème Régiment. Cette attaque va enfin permettre aux Marines d'encercler les Allemands sur la partie sud et est du bois, et d'en prendre possession, ainsi que de nombreux prisonniers, et un matériel important.

En ce jour du 11 juin, des éclaireurs rapportent à leur commandant qu'ils ont pu apercevoir Belleau, cela voulant dire que la lisière nord était atteinte, en fait il n'en est rien, ils sont arrivés sur la lisère est apercevant Bouresches, il faut dire qu'il était très difficile de se repérer dans le bois, surtout que les français leur avaient fourni peu de cartes précises, des vielles cartes au 1/50000 ou 1/80000.

Cette fausse information est rapportée au Général Harbord commandant la brigade Marine, puis au général Pershing, commandant le Corps Expéditionnaire US, et la presse s'empare de cette information titrant que le bois Belleau était pris par les Marines, en fait il n'en est rien et reste à prendre la partie nord, ce qui demandera encore deux semaines et une perte importante en hommes.

Du 11 au 15 juin les Marines progressent encore très difficilement jusqu'au milieu du bois se trouvant maintenant à une distance d'environ 250 mètres de la lisère nord, les conditions sont très dures, pas de nourriture chaude, une gourde d'eau pour deux jours par hommes, les points de ravitaillement en eau se trouvant à Lucy et Bouresches, il fait très chaud, l'odeur des cadavres gisant là depuis une dizaine de jours, les bombardements, les tireurs d'élite embusqués, les gaz, etc.

Les 13 et 14 juin, les Allemands vont bombarder les secteurs Bouresches et Lucy avec des obus à gaz ypérite, 900 Marines seront évacués, il n'y a plus de relève possible pour ceux qui tiennent encore la ligne dans le bois de Belleau, on fait alors appel au 7ème régiment d'infanterie de la 3ème Division US pour relever les Marines les 15 et 16 juin, ces derniers pour les plus chanceux seront envoyés dans la vallée de la Marne dans le secteur de Crouttes pour se reconstituer, là ils profiteront enfin d'un moment de détente, pourront se laver, changer leur uniformes dans un état pitoyable après deux semaines de combats, manger chaud, combler les manquants par des nouveaux arrivés, etc. Tout cela en espérant ne pas retourner de si tôt vers l'endroit qu'ils ont déjà surnommer " Hellwood ", le bois de l'enfer.

Au bois de Belleau, le 7ème d'infanterie tentera d'emporter la victoire en lançant une attaque, le 21 juin, sur la partie nord du bois où sont retranchés les Allemands, cette attaque sera infructueuse, et coûtera énormément au 7ème d'infanterie, qui perdra une partie du terrain conquis auparavant dans le bois de Belleau par les Marines .

Le 7ème d'infanterie, sera relevé par le 3ème bataillon du 5ème Marines, le 22 juin au bois Belleau.

LES AMÉRICAINS DANS LA 2ème BATAILLE DE LA MARNE

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